23 décembre 2013

Bilan de la saison 1913

En décembre 1913, Charles Comiskey, propriétaire de l’équipe des Chicago White Sox, déclare le plus sérieusement du monde : « Dans une douzaine d’années, je serai peut-être manager de l’équipe de baseball d’une ligue internationale comprenant le Japon, la Chine, l’Angleterre, la France et la Russie »[i]. Six mois plus tôt, c’est Ban Johnson, le président de l’American League, qui affirmait que « le jeu va, dans les années à venir, devenir l’un des rares sports réellement internationaux […] Le jeu est apprécié et joué à Cuba, au Japon, en Chine, à Mexico, en Amérique du Sud, à Porto Rico, aux Philippines, en France, Australie, Suède, Allemagne et même en Angleterre »[ii]. Pour ce qui concerne la France, sa petite vingtaine déquipes[iii] et ses quelques centaines de joueurs[iv], c’est indéniablement aller un peu vite en besogne que daffirmer que le baseball y est joué et apprécié mais, pour une première année de pratique véritablement structurée, nous pouvons dire que le bilan est tout à fait honorable et laisse augurer d’un développement extrêmement encourageant.

14 décembre 2013

La Revanche et le baseball

Soldat aux brillants états de service bardé de décorations tout autant que de cicatrices[i], officier ambitieux proche de ses hommes et soutenu par le duc d’Aumale, ami personnel de Gambetta et de Clémenceau qui en fait un radical Ministre de la Guerre dans le gouvernement Freycinet, doté d’un charisme remarquable, capable dans cette France aux courants politiques fort complexes de rallier sous sa bannière - avec pour seul programme une réforme constitutionnelle et la revanche contre l’Allemagne - une troupe hétéroclite de patriotes mécontents de la politique anticléricale, de l’expansion coloniale et surtout des intrigues parlementaires, comprenant aussi bien des partisans de l’extrême gauche que ceux d’une droite dure ou bien encore les bonapartistes ou certains royalistes, le général Boulanger est incontestablement un personnage de la fin du XIXème siècle.

24 novembre 2013

Aye-Aye, Captain!


La lecture des différents articles de la chronique pourrait donner l’impression que, en ce début de vingtième siècle, seuls quelques Parisiens et de très rares Normands ont pu assister à des démonstrations de baseball. Il n’en est rien. Bien que, faute de terrain de sport digne de ce nom à l’époque, les Chicago White Stockings et des All America n’aient pas pu jouer lors de leur passage à Nice en février 1889 (voir l’article Sept petits innings pour convaincre les Français ?) et bien encore que la grande ligue internationale un temps imaginée par Klegin n’ait pas vu le jour (voir La Ligue Européenne de Baseball - Acte I), les Niçois ont tout de même pu, eux aussi, voir de temps à autre quelques matchs de bonne qualité.

9 novembre 2013

Les premiers parrains - Dubonnet

Né en 1883, Émile Dubonnet, fils de Marius Dubonnet, le producteur de spiritueux du même nom[i], est une figure du sport de la Belle Epoque. Sans trop exagérer, nous pourrions dire qu’en réalité il profite de la fortune familiale en s’adonnant aux loisirs. Très intéressé par tout ce qui est moderne, il est tour à tour cycliste, footballeur, patineur, escrimeur, pilote de course, et de manière générale pratique toutes les disciplines possibles avant de devenir un brillant aéronaute et de se classer au premier rang des pilotes aviateurs.


20 octobre 2013

Les premiers parrains - Ford

Pour la fameuse tournée en Normandie[i], le distributeur Ford prête gracieusement neuf automobiles chiffre considérable dans ce pays où il est encore relativement rare de voir une automobile et encore plus exceptionnel d’en posséder une[ii]. Ford semble même avoir disposé de sa propre équipe de baseball à Paris dès la fin de 1913[iii]. Nous pouvons bien sûr imaginer que le groupe automobile veut associer sa marque à ce sport moderne et typiquement américain mais c’est en réalité beaucoup plus simple que cela : Harold B. White, représentant de Ford à Paris pour l’ensemble de l’Europe, a installé le siège de son agence au 61, rue Corneille à Paris, c’est-à-dire juste en face du jardin du Luxembourg où les étudiants pratiquent le baseball. Mais aussi et surtout, il est arbitre officiel.

25 septembre 2013

Les premiers parrains - Spalding

Dans l’édito de l’édition du Spalding Official Baseball Guide[i] pour l’année 1913, A. G. Spalding, le magnat du baseball, fait écrire par John B. Foster :

« Deux nations de plus ont été conquises par le jeu national des Etats-Unis […] La France et la Suède ont annoncé leur intention d’organiser des ligues de Base Ball. Celle de la Suède est bien partie, en effet ils ont un club à Stockholm et d’autres suivront, tandis que les Français, qui se sont progressivement éveillés aux joies des activités athlétiques et qui ont choisi d’y prendre part d’une manière différente, espèrent avoir une nouvelle ligue avant la fin de l’été. Il n’y a aucun doute sur leur intention de jouer au Base Ball. Ils s’efforcent de trouver aux Etats-Unis des joueurs capables d’enseigner et les promoteurs français sont convaincus que l’opportunité devrait être donnée aux jeunes hommes de tirer parti de ce sport dont ils ont tant entendu et si peu vu. »

10 août 2013

La tournée promotionnelle en Normandie

Un mois à peine après lexpédition outre-Manche, poursuivant son idée de porter le baseball au-delà de la seule région parisienne afin de fonder des clubs en province et, ce faisant, rendre possible la constitution dune Commission Centrale de Base-ball au sein de lU.S.F.S.A. (lire pourquoi dans larticle A la recherche de la Commission Centrale de Base-Ball), le très dynamique Allan Muhr organise à l’occasion du long weekend de l’Assomption 1913 une tournée d’exhibition impliquant le Racing Club de France et l’American Paris Team[i]. Accessoirement, cest aussi le prétexte à une virée estivale au bord de la mer, la région sur laquelle Muhr ayant jeté son dévolu étant la Normandie.

31 juillet 2013

Paris Polo Grounds

Attentif au développement du baseball, peut-être intéressé de poursuivre le projet de son collègue du Jockey Club de Paris le marquis de Beauvoir, qui avait fondé lAthletic Club of Paris, ou tout simplement convaincu par le très actif jockey Tod Sloan, le vicomte de La Rochefoucauld, président du club de polo installé vingt ans plus tôt dans le bois de Boulogne, donne son accord au printemps 1913 pour l’aménagement d’un terrain dédié à la pratique du baseball directement dans son enceinte.

8 juillet 2013

London calling

Prétendre que Klegin a, le premier (lire larticle au sujet de la ligue européenne), eu lidée de faire saffronter des équipes de baseball de différents pays dEurope serait très largement exagéré. En réalité, ce projet est dans tous les esprits depuis fort longtemps, comme la conséquence logique du développement du baseball dans chacun des pays concernés et nest dans tous les cas envisagé que comme la première étape à atteindre en vue de linstauration de réelles World Series. A ce stade, en Europe, même si la Suède (lire Le rois des sports, le sport des rois) est officiellement initiée au baseball, il faut bien admettre quelle est par trop lointaine. LAngleterre, en revanche, qui compte aussi une assez importante colonie américaine, dénombre de plus en plus damateurs de baseball et présente le grand avantage dêtre relativement accessible depuis la France. Si finalement Klegin na pas réussi à faire venir Londres à Paris, cest Paris qui ira à Londres !

6 juillet 2013

La Ligue Européenne de Baseball (Acte I)

En mai 1913, le New York Times[i] relaie une information pour le moins sensationnelle en provenance de Londres : une ligue internationale de baseball serait sur le point de voir le jour en Europe dès juin, qui inclurait des clubs de Londres, Paris, Bruxelles, Monte Carlo, Milan, Nice, Copenhague et Berlin. Rien que ça ! aurions-nous envie de dire. En effet, Richard B. Klegin, originaire de Sioux City dans l’Iowa, organisateur d’événements sportifs, après avoir loué le stade anglais du Shepherd’s Bush pour y organiser un match de baseball entre deux équipes de joueurs semi-professionnels de Philadelphie, envisage un temps d’organiser quelque chose de similaire outre-Manche[ii].

1 juillet 2013

Le Racing Club de France

On se souviendra que le Racing Club de France avait fait une première tentative de fondation d’une section baseball en 1898 (lire l’article à partir de la page Chrono). Quinze ans plus tard, les efforts vont porter leurs fruits de manière plus convaincante. 

Une équipe du Racing Club de France est constituée début avril 1913 par le biais d’un appel à candidatures lancé au sein du club par l'incontournable Allan H. Muhr et le Docteur Valadier, et relayé dans le bulletin de l’U.S.F.S.A., la revue Tous les sports[i] :

6 mai 2013

Babe Ruth par William Auerbach-Levy

Preuve, s'il en était besoin, de l'intérêt que portait au baseball William Auerbach-Levy, membre de l'American Paris Team en 1913, voici une fameuse caricature de Babe Ruth réalisée en 1929 à la gouache et à l'encre, conservée par la National Portrait Gallery de la Smithsonian Institution. De nombreux dessins d'Auerbach-Levy sont parus dans les grands journaux et magazines américains, comme par exemple The New Yorker, Esquire ou encore Collier's.

4 mai 2013

L’American Paris Team


Le moment est venu de prendre la peine de nous attarder sur la composition des deux équipes phares de la saison 1913 que sont lAmerican Paris Team et le Racing Club de France. Si quelques noms de joueurs de cette dernière ont été précédemment évoqués (voir Muhr et le Comité de Paris), nous reviendrons très bientôt plus en détail sur cette équipe. L’American Paris Team nous est, quant à elle, encore inconnue bien quelle compte dans ses rangs quelques-uns des plus brillants représentants de la jeunesse américaine dans la capitale. Vous trouverez ci-après une brève présentation de quelques-uns de ses membres ayant joué durant la saison régulière[i]. La plupart acquerront, chacun dans son domaine, une renommée mondiale. Cest dire si cette équipe est un historique et remarquable concentré de talents en tous genres et mérite notre entière attention !

1 mai 2013

Pourquoi nous combattons


Une fois n’est pas coutume, je vais ouvrir une courte parenthèse pour traiter d’un sujet qui ne devrait apparaître que bien plus tard dans notre chronologie. Ayant pu assister hier soir à une projection du film retraçant la vie de Jackie Robinson, je me suis finalement décidé à vous parler de manière prématurée, non pas tant de celui qui portait le numéro 42 que d’un de ses coéquipiers de l'université de Californie à Los Angeles (UCLA). Je reviendrai évidemment plus en détails ultérieurement sur cette période.

25 avril 2013

Sur les rives de la Monongahela


Comme tous les lundis, Paul Reynal[i], employé de l’American Window Glass Company dans le comté de Westmoreland, éprouve quelques difficultés à se concentrer sur la tâche quil a à accomplir. Les aiguilles du cadran ne vont pas assez vite à son goût. Le lundi est traditionnellement le jour du championnat paroissial et en ce 28 juillet 1913, léquipe des Presbytériens doit affronter celle des Luthériens dans laquelle son ami denfance Ray McKee est lanceur, autant dire quil a hâte de le voir à lœuvre.

22 avril 2013

La All-Paris League (4ème partie) – Le diagnostic


Après seulement quelques semaines, les journalistes américains commencent à établir un premier bilan sportif. Ils relèvent qu’il reste bien des progrès à accomplir aux Français, qui n’ont aucune difficulté à la batte mais « lancent comme des filles » et n’arrivent pas à intégrer le concept du slide, tout concentrés qu’ils sont à faire en sorte ni de se salir ni de paraître débraillés... William Simms, correspondant à Paris pour United Press, rapporte ainsi dans un article pour The Mansfield Shield qu’il a assisté à une scène assez amusante au cours de laquelle Tod Sloan essayait de démontrer l’utilité de la glissade à ses jeunes joueurs : au moment où il effectua délibérément son slide, tous les joueurs se précipitèrent instantanément tout affolés vers lui pour l’aider à se relever, lui demander comment il avait fait pour tomber et s’il ne s’était pas fait trop mal…[i] Ce même Simms explique, dans un article paru dans The Toronto Sunday World[ii], que lorsqu’un lanceur touche malencontreusement un batteur en lançant sa balle le match s’arrête plusieurs minutes afin que le lanceur puisse lui présenter ses excuses. Simms, encore et toujours mais pour The Saskaton Phoenix[iii] cette fois, s’étonne de ce que les Français, dont la réputation sous la canonnade n’est plus à établir, puissent à ce point avoir peur d’une si petite balle. Il nuance toutefois son sévère jugement en soulignant qu’ils apprennent si vite qu’ils seront certainement en mesure de participer au championnat dès l’été prochain et qu’ils débordent d’enthousiasme pour cette nouvelle discipline : « Ils l’appellent Ze national game of ze France ».

15 avril 2013

La All-Paris League (3ème partie) – La contagion


Le virus gagne les établissements scolaires parisiens les uns après les autres, notamment l’Ecole Libre Pascal, les Lycées Fénelon et Bossuet, mais également les Boy Scouts. Nous pouvons lire dans The San Francisco Call que
« l’Ecole Pascal est en tête du championnat interscolaire […] plusieurs milliers de personnes se sont rassemblées sur le terrain de Bagatelle dans le Bois de Boulogne pour assister au match entre l’équipe du Lycée Condorcet menée par son capitaine M. Jacques de Saint Maurice et celle de l’Ecole Pascal, menée par M. J. Coudert […] Les gars de Pascal ont largement battu ceux de Condorcet sur le score de 27 à 8. Le lanceur Gervais [de] La Fontaine, petit-neveu du poète, s’est illustré au lancer. » [i]

12 avril 2013

La All-Paris League (2ème partie) – La fièvre


Evoquant le phénomène du baseball à Paris en mai 1913, le Sunday Chronicle[i] parle littéralement d’une fièvre collective, d’une tempête qui s’est soudainement abattue sur la ville : « Les magasins de sport font des stocks de balles, de battes, de masques, de gants pour pouvoir faire face à la demande croissante ». Voilà qui doit certainement faire le bonheur de Burgess. « Plusieurs centaines de spectateurs curieux ont fait le déplacement jusqu’à Colombes il y a quelques jours pour voir le premier match joué officiellement par le Racing Club. Au fur et à mesure que le match progressait, les Parisiens étaient de plus en plus fascinés et, à la fin de la neuvième manche, chacun se promettait d’essayer de jouer ».


10 avril 2013

La All-Paris League (1ère partie) – L’inoculation


Les préparatifs pour le lancement du championnat, ou de la « All-Paris League », comme certains l’appellent déjà, ont été menés particulièrement consciencieusement[i]. Sous l’action conjuguée et les efforts de l’Union Française du Base Ball, de l’A.B.B., du Comité de Paris et des différents clubs, la pratique va prendre une ampleur inédite en l’espace de quelques mois.

8 avril 2013

A la recherche de la Commission Centrale de Base-Ball

Peu de temps après la fondation du Comité de Paris, le Bureau du Conseil de l’U.S.F.S.A. se réunit le 29 avril 1913 sous la présidence de Pierre Roy. Les autres membres du Bureau à assister à la séance sont Frantz Reichel, Secrétaire Général, Paul Champ, Enderlin, Paul Ferrand, Pierre Gillou, Henri Glin, Louis Le Bel, Lemercier, Prétavoine, Savineau, Vialla, Vieillard. Suivant lordre du jour et après délibération, le Bureau charge Allan Muhr de former une Commission Centrale de Base-Ball et den soumettre la composition à l’approbation du prochain Conseil[i]. En d’autres termes, le développement du baseball s’apprête à franchir une étape supplémentaire avec la mise en place d’une organisation véritablement à l’échelle du pays.


5 avril 2013

Muhr et le Comité de Paris

Depuis sa constitution, la grande fédération omnisport (l’U.S.F.S.A.) reconnaît certes pleinement l’existence du baseball mais le moins que l’on puisse dire est qu’elle n’a pas été très active dans ce domaine particulier. Puisqu’il existe déjà des clubs à Paris depuis fort longtemps, il suffirait pourtant de faire un simple effort d’organisation et de communication pour dynamiser leurs activités. Concrètement, la première étape devrait être la constitution d’un comité regroupant ces clubs en un organe local de la fédération ; la seconde étape devrait consister à créer des clubs en province et à les rattacher à un nouveau comité ; la troisième enfin devrait être la fondation d’une commission centrale de baseball regroupant les comités locaux au sein de la fédération. En soi, rien de bien sorcier au fond.


3 avril 2013

Burgess et l’Association de Base Ball du Lycée Condorcet


Parallèlement à lUnion Française de Base Ball fondée par Messerly, le newyorkais William H. Burgess se lance en 1913 dans une initiative qui peut sembler un peu folle mais qui porte visiblement rapidement ses fruits. Il explique innocemment au journaliste de l’Evening Independent qui l’interroge[i] les circonstances dans lesquelles ce projet a germé dans son esprit et finalement vu le jour : Son employeur l’a envoyé à Paris pour développer le marché européen. Il a proposé d’emporter un stock d’équipement de baseball, ce que son employeur a tout d’abord pris pour une plaisanterie, lui disant « Ils ne jouent pas au baseball là-bas et n’y joueront jamais ». Il lui aurait alors rétorqué : « Ils y joueront lorsque je leur aurai appris ». A son arrivée en France, ses collègues ont éclaté de rire lorsqu’il leur a fait part de ses idées.

1 avril 2013

Mais qu’est-ce que le baseball ?


Nous l’avons vu précédemment, l’ascension fulgurante de Thorpe et sa chute icarienne ont été l’occasion de faire découvrir le baseball à un large public français, faisant passer assez brutalement ce sport de l’ombre à la lumière. Une fois dépassé le stade de la surprise, un très grand nombre de journalistes français s’attachent à en savoir un peu plus sur le sujet, c'est-à-dire au-delà du simple phénomène Thorpe. Ceci donne l’occasion aux lecteurs, même en province, d'apprendre deux ou trois choses fort utiles sur cette discipline en ce début d'année 1913.

28 mars 2013

Un géant parmi les géants

L'arrivée chez les New York Giants de Thorpe ne manque pas de susciter toutes sortes de réactions. L'athlète surdoué des Jeux de Stockholm marque les esprits par ses performances et son imposant gabarit. Le 3 février 1913, The Evening World gratifie ses lecteurs newyorkais de quelques dessins d'Edgren[i], qui laisse totalement libre cours à son imagination.

27 mars 2013

Honnissez cet homme !


Peu de temps après les Jeux de Stockholm, un journaliste américain découvre des éléments compromettants dans le passé de Thorpe, révélés par un homme se présentant comme son ancien manager. Interrogé par l’Amateur Athletic Union, Thorpe avoue avoir touché de 2 à 35 dollars par semaine pour jouer durant les étés 1909 et 1910 dans les équipes de baseball de ligue mineure de la Class D Eastern Carolina League[i]. Il a beau expliquer qu’il n’était pas conscient à l’époque des faits qu’il concourrait un jour aux Jeux, rien n’y fait. Aux yeux de Coubertin et de ses fidèles, les grecs des Jeux antiques n’étaient pas payés pour leur performance et il ne saurait en être autrement pour les athlètes modernes[ii]. La sacro-sainte règle de l'amateurisme si difficilement définie lors du Congrès de Paris a été enfreinte. La sanction tombe en janvier 1913 : il est radié à vie et contraint de restituer ses médailles. C’est bien évidemment un énorme scandale. La relation entre le baseball et le mouvement olympique ne sera jamais plus tout-à-fait la même.

25 mars 2013

Oui! Oui! Zee French Baseball

Signe de l'intérêt des Français pour le baseball ou à tout le moins de l'intérêt des Américains pour le développement du baseball en France, l'édition du 5 novembre 1912 du journal newyorkais The Evening World est illustrée très sympathiquement par le dessinateur Vic. On y trouve un florilège de clichés sur les Français, tels que les Américains se les représentent alors : moustachus, portant le béret, prompts à se battre en duel, raffinés voire précieux mais c'est un vrai régal. Jugez-en par vous-mêmes.

22 mars 2013

Résoudre le problème olympique


Belle idée que celle de Franz Messerly ! En tant que tel toutefois, il n’invente strictement rien. Il ne fait que reprendre à son compte la théorie développée et répandue depuis de nombreuses années par Albert Goodwill Spalding, visant à justifier les succès répétés des athlètes américains. Est-ce la raison pour laquelle, l’article de Sporting Life auquel nous faisions référence dans notre article précédent est illustré d’une photo de Spalding ? Cela laisse dans tous les cas supposer valablement que celui-ci n’est pas étranger ni à cette initiative, ni à la provenance des fonds destinés à rémunérer les instructeurs.

20 mars 2013

Messerly et l’Union Française de Base Ball


Suite aux succès de Thorpe, c’est une conjonction d’initiatives fortement complémentaires qui va enfin donner au baseball français sa première véritable chance de rayonner et de se développer efficacement et durablement. Tout d’abord, en fin d’année 1912, Sporting Life[i] publie un article au sujet du projet d’un certain Franz O. Messerly[ii] et reproduit la lettre que celui-ci adresse à James Edward Sullivan, fondateur de l’Amateur Athletic Union (AAU) et membre du Comité Olympique lors des récents Jeux de Stockholm[iii] :

18 mars 2013

Le roi des sports, le sport des rois


La cinquième édition des Jeux Olympiques se tient à Stockholm du 5 mai au 27 juillet 1912. Si la capitale suédoise a été retenue, c’est tout simplement parce qu’aucune autre candidature n’a été déposée. Pour autant, ces jeux sont synonymes de qualité, d’innovation et d’universalité, car pour la première fois depuis leur rétablissement, les athlètes proviennent enfin des cinq continents. Plusieurs pays - notamment le Japon, le Portugal ou encore la Serbie - font leur première apparition à la grand-messe du sport. Coubertin, Président du Comité International Olympique, remarque lyriquement dans ses mémoires : « Ce furent, cinq semaines durant, la liesse continue de la nature, le soleil étincelant à travers la brise de mer, les nuits radieuses, la joie des pavoisements multicolores, des guirlandes fleuries et des illuminations nuancées par l'éclat d'une lumière qui ne mourait jamais ». Entre autres événements, les Français retiennent la performance de Jean Bouin, qui bat le record du monde du 5.000 mètres.

16 mars 2013

Virus ?


Sans que cela ait de quelconque rapport avec les projets de Horace FogelThe Democratic banner, journal de Pennsylvanie, mentionne au mois de septembre 1910[i] que trois Français, Messieurs le comte de Lapparent[ii], Riaux-Boulay et L’Abbé Etienne, venus à Pittsburgh pour inspecter des manufactures ont eu l’occasion d’assister à un match joué devant 30.000 spectateurs par les Pirates au Forbes Field. Spirituel, le journaliste ajoute que les Français sont ressortis de cette expérience atteints par le virus du baseball à un point tel que la contagion devrait rapidement se propager jusqu’à Paris...

13 mars 2013

L’invasion des Phillies


En février 1910, alors que les Parisiens ont les pieds dans l’eau en raison d’une crue sans pareille de la Seine[i], quelques journaux américains[ii] annoncent comme une certitude « l’invasion » de la capitale française par la Philadelphia National League Team, autrement dit les Phillies (par opposition à la Philadelphia American League Team à savoir les Athletics), à l’issue de la saison sur le point de débuter. L’objectif poursuivi est apparemment on ne peut plus simple : faire découvrir le baseball au public français au travers d’une série d’exhibitions.

11 mars 2013

L’Athletic Club of Paris

Ludovic Charles Marie Hébert marquis de Beauvoir[i], dont la famille est réputée pour être particulièrement dévouée aux Princes d’Orléans, a accompagné dans sa jeunesse son ami Pierre d’Orléans[ii], duc de Penthièvre, dans un tour du monde de deux ans qui l’a conduit en Australie, à Java, au Siam, en Chine, au Japon et aux Etats-Unis[iii]. A-t-il découvert le baseball lors de son passage en Californie en 1867 ? C’est envisageable.

7 mars 2013

Une décennie perdue ? (seconde partie)


A peine six mois plus tard, c’est Fernand Bidault qui propose sa vision quelque peu ironique dans La vie au grand air[i] : « Le baseball a ceci de commun avec le Pôle Nord, la direction des aéroplanes et un certain nombre d’autres objets qu’il nous reste encore à le découvrir. Nous sommes à la fin de 1907, et nous ignorons toujours le base-ball. Et aucun indice ne nous permet d’espérer que nous pourrons voir de près, en France, un joueur de base-ball dans un temps plus ou moins éloigné ». Et plus loin : « le base-ball est un sport salutaire, émouvant, et capable d’exciter au plus haut point les passions humaines ». Cet article nous apprend au passage que l'Union des Sociétés Françaises de Sports Athlétiques, la fameuse fédération omnisports, a « codifié » le baseball ; il faut sans doute comprendre par là qu’elle en a traduit les règles officielles. Et Fernand Bidault d’ajouter avec une fausse naïveté : « A force de voir réglementer ce sport jusqu’ici inconnu, quelques observateurs finiront bien par remarquer son existence et un nouveau champ sera ouvert à notre dévorante activité ». Il aurait été intéressant de savoir qui, au sein de l’U.S.F.S.A., a participé à ces travaux de réglementation. Malheureusement, aucune information ne nous est donnée à ce sujet.

5 mars 2013

Une décennie perdue ? (première partie)


Qu’on ne s’y trompe pas, le match du Buffalo Bill’s Wild West n’est pas du tout représentatif de l’activité baseballistique durant la première décennie de ce nouveau siècle et doit plus être considéré comme un événement isolé. Bien qu’à la suite du turf et du cyclisme les journaux et revues spécifiquement dédiés au sport et les colonnes consacrées aux compétitions dans la presse généraliste n’aient jamais été aussi nombreux[i], l’information sur le baseball se fait soudain plus rare dans la presse. Les quelques articles et ouvrages qui traitent de ce sport en France sont particulièrement décevants et ne permettent pas de se faire une idée précise de sa pratique : si le journal est américain, il y fait allusion de manière très vague ; si le journal est français, le baseball y est souvent traité comme une curiosité plus que comme une activité vraiment digne d’intérêt ou réellement concrète. A croire que l’incident du duel de 1901 a bel et bien sonné le glas du développement de cette discipline dans l’hexagone. Voici un petit échantillon de ce qu’il est possible de trouver.

1 mars 2013

Le retour de Buffalo Bill

Seize ans après un premier passage très remarqué, Buffalo Bill est de retour en France en 1905. Son nouveau spectacle, le Buffalo Bill’s Wild West and Congress of Rough Riders of the World, repose sur une troupe encore plus imposante que la première fois[i] et démontre quà 59 ans il na pas son pareil au monde pour les attractions héroïco-foraines : outre les classiques cow-boys, indiens et autres mexicains, toutes sortes de nouveautés sont inscrites au programme, comme par exemple « les cosaques, véritables acrobates du cheval, qui chargent debout sur leur selle au triple galop, les arabes qui sélancent en frénétiques fantasia »[ii], les cavaliers anglais de retour du Transvaal et bien sûr les Rough Riders de Roosevelt dans une épique reconstitution de la bataille de San Juan.

27 février 2013

Duel, baseball et Prix Nobel de la Paix


Nous l’avons vu dans notre précédent article, le duel au sabre en juillet 1901 entre Albert Hopkins et son adversaire français aurait gravement compromis les projets d’instruction du baseball à Paris. Il est assez difficile de concevoir qu’une simple dispute ait pu avoir un tel effet alors même que le Ministre Leygues lui-même s’intéressait de près à cette expérience ; il semble à tout le moins nécessaire, pour justifier une telle conséquence, que le protagoniste d’Hopkins ait eu une influence non négligeable. A proprement parler, nos recherches ne nous ont pas permis de trouver cet Henry d’Estournel dont il est question dans la presse mais il se peut fort bien que les journalistes américains aient écorché le nom de cet individu. Aussi, il nous paraît plus vraisemblable que l’identité exacte de celui-ci soit Paul Henri Benjamin Balluet d'Estournelles de Constant, baron de Constant et de Rebecque, personnage qui présente quelques caractéristiques indéniablement compatibles avec notre contexte.